Mon Home
758 viewsQuand je suis née, il y a eu un très grand feu d’artifice, partout 😀
Nooooon je ne suis pas célèbre, fille d’un Roi ou d’un Emir, mais peu après ma naissance, la guerre a éclaté pour ravager le tout. Mon feu d’artifice, c’était les bombes ! Innovant, non ?
Et la danse commença. Et pas n’importe laquelle. Vous dîtes salsa, cha cha, tango, rumba ? Je réponds courir, fuir, se baisser, ramper, marcher à 4 pattes, se blottir. Plutôt comme un jeu de Dodgeball.
Et vous me demandez où a eu lieu cette plaisante activité ? Et bien c’est partout. Vu que nous avions perdu notre maison peu après le début de la guerre, j’ai dû me déplacer d’une région à l’autre, et d’une maison à l’autre, pour une vingtaine d’années à peu près, et 20 km à pieds, ça use les souliers!
Ah, les souvenirs d’enfance ! C’est loin tout ça maintenant. Enfoui tout au fond de ma mémoire, loin de mes pensées (pour être plus précise, j’ai creusé un trou de 25 cm dans mon cerveau, j’y ai déposé ces souvenirs, je les ai recouvert de béton, sur lequel j’ai passé une bonne couche d’asphalte, le vrai, pas celui qu’on trouve sur nos routes. Croyez-moi, c’était le seul moyen possible pour pouvoir les oublier).
Mais une idée persiste. Je n’ai jamais appartenue à nulle part ! Ce permanent déplacement, ce constant sentiment de ne pas être chez soi, a bien fait des ravages en mon for intérieur.
Un seul mot résonne toujours en moi : « Home ». Je ne trouve pas le synonyme en français, il n’y en a pas (n’allez pas consulter Google Translate, maison et foyer et gîte n’expriment pas vraiment ce que je veux dire).
“Home, I wanna go home”
Que de fois n’ai-je répété cette phrase ? Tout au long de mes journées, tout au long de mes nuits. Même aujourd’hui, vivant dans ma propre maison, je la dis parfois. Je me regarde alors sarcastiquement, avec un sourcil relevé, et je me dis :
– Mais tu déconnes ? Tu es chez toi, non ?
Et comme je ne sais pas me taire, je me réponds tout de suite, judicieusement :
– La ferme.
Bon j’avoue, ce n’est pas une réponse intelligente, mais que sait-elle vraiment, cette part de moi ? Elle croit qu’une chambre, un toit, un lit à soi, c’est plus que suffisant, vu qu’elle en était privée pour longtemps. Mais pas moi. Je sais bien que c’est très très important, mais…
Je n’ai jamais appartenue à nulle part, jusqu’au jour où… Harry rencontre Sally. Ah non, ceci est un autre film, pardon …jusqu’au jour où je suis tombée amoureuse, d’une fille.
Bon, je ne vais pas mentir et dire qu’à cet instant là, mes démons ont disparu et que ma vie est devenue toute rose. Je ne vais pas non plus sombrer dans le romantisme et me pâmer en racontant mes ébats amoureux. Je veux juste dire que la notion d’appartenance est trop compliquée pour moi. On appartient à un pays, à une région, à une famille, à une société. Tout au long des années, on construit notre identité, brique par brique, sur une solide base, un solide ancrage. Et face aux tempêtes, on se réfugie dans notre “Home” pour trouver sécurité, force et courage.
Pour moi c’est un peu différent. Je n’avais pas de maison pour pouvoir la considérer comme Home, je ne vivais pas dans une seule région pour pouvoir m’ancrer, et le plus dur, et comme si ça ne suffisait pas, j’étais “différente”. Je ne pouvais pas me baser sur une conventionnelle relation Femme / Homme pour bâtir ma vie et m’y réfugier. Je n’avais pas de repère, nulle part.
Ce n’est que le jour où je suis vraiment tombée amoureuse d’une fille, le jour où j’ai vraiment su que j’étais homosexuelle, le jour où je l’ai vraiment accepté et assumé, que finalement, je me suis sentie apaisée.
C’est où mon Home? C’est dans les bras de la fille que j’aime.
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