Mon Drole De Valentin 2008

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Je suis une femme transgenre résidant en France, et je travaille comme escort-girl et dominatrice.

00961Le 14 février 2008, vers 21 h, je reçois un appel sur ma ligne de téléphone professionnelle, d’un numéro commençant par 00961, donc depuis l’étranger. Je n’ai pas reconnu le pays dont il s’agissait, je ne l’ai compris que plus tard, après le coup de fil, en faisant des recherches.

Un homme à la voix plutôt agréable, parlant parfaitement bien le français, avec une très légère pointe d’accent méridional, me demande si je suis bien Maîtresse X (en utilisant mon nom d’escort-girl au lieu de mon nom de dominatrice, ce qui est curieux : je sépare mes deux activités, comme la clientèle n’est pas la même). Je lui réponds que oui. Il me dit qu’il a vu mon annonce sur un site très connu, qu’il la trouve intéressante, etc… jusque-là rien d’exceptionnel.

Ensuite il me dit qu’il recherche une dominatrice qui pratique “la domination vraiment hard, physique, et aussi sexuelle, avec de vrais coups au visage, et du viol” (je cite de mémoire). Un voyant rouge s’allume dans mon cerveau : je suis souvent contactée par des hommes qui ont des fantasmes de soumission très violents mais n’oseront jamais les réaliser. Et de toute façon il n’y a pas de place pour tout ce qui est non-consensuel dans ma conception du BDSM. Donc je suis en train de me dire qu’il s’agit une fois de plus d’un fantasmeur qui va me faire perdre quelques minutes de mon temps, qui cherche à s’émoustiller en me prenant pour un service gratuit de téléphone rose… Mais en même temps, j’ai l’impression (ça se sent au téléphone) que cet homme ne se renseigne pas pour lui-même, que ce ne sera pas lui mon soumis si je donne suite à sa demande, et ça me fait tiquer. Je veux en savoir plus, et je continue courtoisement la conversation.

Je réponds que “hard” est une notion très relative et que, bien que je tienne beaucoup au côté cérébral du BDSM, je sais bien sûr être “hard” en jeu, et aussi “sexuelle”, s’il y a consensus mutuel sur tout cela. Mais que tout ce qui laisse des dommages permanents au corps ou à la psyché de l’autre est totalement exclu pour moi. Et le viol réel bien sûr aussi : ce n’est pas un jeu. Mon interlocuteur a l’air déçu.

Il me demande “Si on vous paie le voyage, vous vous déplacez à l’étranger pour exercer ?” Un deuxième voyant rouge s’allume en moi : il est évidemment hors de question que je me déplace à l’étranger chez de parfaits inconnus pour y travailler. Souvent, je suis démarchée par des hommes, notamment du Maghreb ou d’Afrique noire, qui me proposent un “voyage de vacances tous frais payés” dans leur pays : trop grosse la ficelle, je n’ai aucune envie de finir comme esclave sexuelle dans les bas-fonds d’une ville étrangère… Mais cette fois-ci ce n’est pas de ça qu’il s’agit, mais bien de dominer, et violemment (la domination n’intéresse évidemment jamais les recruteurs pour maisons closes étrangères : ce sont des femmes soumises qu’ils recherchent, pas des dominatrices).

Je commence à comprendre que cet homme est en train de me parler de tortures réelles, pas de jeux BDSM. Et que ce ne serait effectivement pas lui qui serait mon soumis mais que j’aurais à “m’occuper” de tierces personnes (ce qui est déjà à la limite du consensuel en soi, et puis surtout : à qui cela profiterait-il ?). Et je commence à flairer l’embrouille politique : je sais que je suis politiquement repérée en France, est-ce qu’on serait en train de me tendre un piège ? Ma méfiance est bien entendu alertée, mais je décide de continuer la conversation pour voir jusqu’où tout ça ira.

Je me dis pendant un instant que je devrais peut-être faire semblant de jouer le jeu pour en apprendre plus, mais je n’ai pas très envie de perdre mon temps là-dedans, comme je suis déjà sûre que je ne donnerai en aucun cas suite à cet appel. Et s’il s’agit d’un piège, je n’ai bien sûr aucun intérêt à me laisser pousser à une faute. Je réponds donc que je ne me déplace jamais à l’étranger, que j’ai besoin de mon donjon et de mes jouets à moi pour bien dominer (et je m’attends presque à ce que mon interlocuteur me réponde “Mais nous avons un donjon super-équipé, très moderne, avec toutes les chicanes, Maîtresse !”… mais non, il ne va pas jusque-là…)

Mon interlocuteur sonne encore plus déçu, mais tente une troisième chance pour me séduire à son offre : il me dit que j’ai l’air d’être bien musclée sur mes photos (je suis trans’, d’accord, mais n’exagérons pas, je ne suis pas bodybuildeuse), et me demande si je pratique un sport de combat. Je lui réponds que non, mais que ça m’a déjà traversé l’esprit de pratiquer des arts martiaux pour entretenir mon corps (ce qui est vrai, mais je veux surtout savoir où il veut en venir). Enjoué, il me demande si ça m’intéresse de me faire former en sports de combat (ce qui n’est pas la même chose que les arts martiaux), et je lui réponds que les sports en soi ne m’intéressent pas, que je ne recherche pas la compétition, mais le côté spirituel des arts martiaux. Il me fait comprendre que dans ce pays étranger, je pourrais pratiquer avec de bons spécialistes, qui pourraient bien me former…

Alors là j’ai l’impression de me retrouver en plein film de James Bond. Il est évident que cet interlocuteur n’a rien d’un client ordinaire, et que ce qu’il me propose est extrêmement louche.

Je lui réponds que non, ça ne m’intéresse pas, et après quelques formules de politesse on se quitte. En raccrochant, je me dis que j’aurai décidément tout vu dans ce job…

Je veux comprendre les ficelles de cette histoire louche, et je vais donc vérifier de quel pays cet homme m’appelait, selon l’indicatif affiché par mon téléphone. Et là je comprends beaucoup de choses d’une seconde à l’autre…

Alors quelques questions, ou devinettes (j’y ai bien sûr trouvé mes propres réponses) :

- Qui dans ce pays pourrait se sentir le plus humilié par une tortionnaire transgenre qui le viole ?
- Donc qui m’a appelée pour louer mes services (sans d’ailleurs jamais parler d’argent) ?
- Était-ce un piège français (ce ne serait pas le premier qu’on essaie de me tendre), ou une démarche provenant réellement de l’étranger ? (La qualité sonore de l’appel était parfaite, peut-être trop pour provenir de quelques milliers de kilomètres, et je sais qu’on peut
simuler des numéros d’appel si on en a les moyens techniques.)
- Si cette offre était réelle : pourquoi faire appel à une dominatrice professionnelle ? Pourquoi une transgenre ? Et pourquoi une étrangère ? Les réponses semblent assez logiques, si cet appel provenait réellement de ce pays.

Je me suis aussi dit que si ce n’était pas un piège monté contre moi en particulier, d’autres dominatrices transgenre ont peut-être reçu le même genre de coup de fil. J’ai essayé de le savoir, mais sans succès. Donc piège bien français ou offre étrangère réelle, le mystère reste
entier. Mais dans les deux cas cette affaire est très sale.

Et non, ça n’avait absolument pas l’air d’une blague ou d’un canular (je ne suis pas très naïve…), tout se tenait parfaitement. Étrange soir de la St-Valentin..

Contributed by C.

Guest Contributor

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