Escale à Istanboul

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- “Tu veux que je te masses le dos?”
Et voilà la preuve. C’est vraiment un ange tombé du ciel, au fond de mon lit. J’avais prié pendant des journées pour que quelqu’une vienne me frotter le dos après ces deux semaines de travail pénible. Je suis esquintée.

Elle m’embrasse dans l’ascenseur, et même si j’ai les yeux clos, je ressens la lumière qui change en noir et blanc à travers les vitres. Elle m’essuie les lèvres de son rouge. Je regarde dans le miroir, j’ai l’air d’un loup qui vient de dévorer sa proie.  Bon ça suffit avec le coq qui s‘imagine être un lion. En réalité, j’ai l’air d’un clown.

Il est 6 heures du matin. Il fait frais. La Rue Istiqlal s’est endormie finalement. Je lui prends la main et je fonce sur la route pavée. Je sens que je tiens le monde tout entier entre mes mains avec son accent français, son teint africain et ses fesses brésiliennes. Je ne supporterai plus jamais l’équipe d’Espagne durant la coupe du monde. A moins que son amour pour Barcelone ne dépasse le mien…

Je fume une cigarette à la menthe pour me rafraîchir l’haleine. Je lui enlève les petites miettes de viennoiserie du bord de sa bouche. Je retire ma cigarette, je souffle la fumée dans l’air en contemplant la clarté du ciel turc. Je remarque des traces de rouge à lèvres sur mon filtre. Je m’éclate de rire.
- “Y’en a toujours une première fois”.

On quitte la ville. Elle me prend la main et s’endort sur le bord de la fenêtre. Qu’elle est belle. Je regrette qu’elle n’ait pas assez dormi, mais pas vraiment. Il faut dire que si ça ne tenait qu’à moi, je ne l’aurais même pas laissé cligner les yeux.

Je vais et je viens, je m’apprête à sortir mes griffes et à cracher du feu au visage de la femme à l’accent russe le moins sexi du monde, qui vient de couper la file d’attente pour l’enregistrement, mais je me retiens. Je suis fâchée. Je ne veux pas qu’elle parte. D’ailleurs je pars moi aussi.

Elle me prend dans les bras. Je caresse sa tête d’hérisson, et j’ai envie de planter des tout petits bisous partout sur son corps en 20 secondes. Je voudrai passer des nuits à typographier l’alphabet sur sa peau, avec la langue. La mienne garde toujours les traces de son essence parfumée.

C’était une nuit d’amour passager, unique par rapport aux autres.  Cette jeune étrangère s’est gravée une adresse dans mon cœur.

J’écris ces mots et je me contente d’une tasse de thé et de la compagnie de mon copain de joie et de solitude, M. Charles Aznavour.

Tags: amour passager, French, one night stand, The Revolving Door