Un Gaydar En Panne!
878 viewsMon Gaydar est en panne….ou c’est ce que je croyais.
Je me suis dite: Mais zut, il faut le réparer! Et je suis partie à la recherche d’un gaydaricien/ne.
Après maintes recherches frustrantes et épuisantes (vous savez bien que malheureusement ils/elles ne sont pas listé(e)s dans les pages jaunes), j’ai fini par dénicher un par l’intermédiaire de la cousine de la voisine de l’amie de mon amie.
Je suis arrivée chez lui avec un sourire tellement large que le goût de mes lobes d’oreilles était resté toute une semaine ancré sur mes lèvres.
Après les questions rituelles (nom, âge, sexe, religion!!), il m’a enfin posé LA question:
- Que puis-je pour vous?
- Ahhhhh! Il y a des questions dans la vie qui, telle une mélodie, vous transporte parfois sur un nuage. Que puis-je pour vous? Mais me changer toute ma vie, bien sûr! Mon Gaydar est en panne, monsieur, je ne peux rien voir autour de moi. Et le plus frustrant est que ce sont mes amis hétéros qui me font toujours la leçon! Que puis-je pour vous? Pfffff, quelle question! Je suis en panne, réparez-moi, voilà.
- Mais madame, c’est un plaisir. Asseyez-vous là, je vais voir tout ça.
Mon ami le Gaydaricien passa plus d’une demi-heure à me tourner autour. Il me tâta le pouls, me fit tourner la tête à droite et à gauche, vérifia ma respiration, scruta les profondeurs de mon regard, écouta les battements de mon cœur, et à la fin, il fit quelques toc toc sur ma tête et me dit… Ecoutez bien:
- Madame, votre Gaydar n’est pas en panne. Vous n’en avez pas, tout simplement!
Non, non, ne relisez pas la phrase, vous l’avez bien lue. Il m’a bel et bien dit que je n’avais pas de Gaydar.
J’étais hébétée, ébahie, abasourdie, ahurie (ce sont tous des synonymes, je le sais). J’étais venue réparer un organe que je ne possédais pas. Un peu comme si je prenais mon TV modèle 1980 et demandais qu’on lui répare l’écran LCD. Et puis cette compassion dans la voix “mais madame” (traduction: Ah, la pauvre), et ce sourire à demi caché “vous n’en avez pas” (traduction: Wahahaha). Je n’ai pas posé de questions. J’ai payé et je suis sortie, la tête basse et le cœur gros.
Qu’allais-je faire maintenant? Continuer à vivre comme avant, sans pouvoir repérer mes confrères? Mais c’est pas facile comme vie, ça! Je ne peux pas, je ne veux plus.
Et voici que soudain, un éclair déchira le ciel, le tonnerre gronda sur ma tête, et la lumière fut. Non, je ne fus pas dotée miraculeusement d’un beau Gaydar flambant tout neuf, mais il a commencé à pleuvoir, et moi pour ma part, j’ai compris, je me suis comprise.
Avoir un Gaydar c’est posséder la capacité de reconnaître qu’une personne est homosexuelle. Et reconnaître qu’une personne est homosexuelle, c’est l’étiqueter et la différencier d’une personne hétérosexuelle. Et étiqueter une personne, c’est admettre qu’elle est différente. Et pour moi, nous sommes tous pareils.
Malheureusement, on ne voit jamais les personnes, on cherche toujours les différences, et cruellement. On ne se réfère pas à nos compatriotes par ce/cette libanais(e), mais c’est très commun d’appeler les autres par leur nationalité: le syrien, la sri-lankaise (même si elle vient des Philippines), cet égyptien… Toute personne ayant une peau noire est nommée immédiatement: “El 3abed (le Nègre)”. Et pour ma part, je n’ai jamais vu un groupe de gens pointer quelqu’un et dire: “Ah, mais regardez cet hétéro” alors qu’il est tout à fait “normal” de montrer une personne du doigt parce qu’elle est homo!
Je ne vois et ne veux voir que les personnes.
Mon gaydaricien avait raison, je n’ai pas de Gaydar. Et le plus important, c’est que je n’en ai pas besoin. Je suis bien comme ça.
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