Devenir
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Quand je me suis décidée à me confier à ma meilleure amie, elle m’a répondu tout simplement : « je n’te crois pas. C’est juste que les mecs dans ta vie t’ont déçue une fois de trop. »
Je ne voulais pas la bombarder d’arguments. J’étais sure de mon identité. Je voulais qu’elle en soit sure aussi. J’étais décidée à garder mon soutient émotionnel. La fille d’autrefois existait toujours, sauf que maintenant elle s’affirmait mieux.
Déçue par les hommes, ça c’est vrai. J’avais 7 ans lorsque mon cousin m’a pris pour un fameux petit tour en voiture. J’avais 14 ans lorsque mon professeur de guitare m’a demandé de rester quelques minutes après le cours. Une fois, deux fois… huit fois. Et j’avais 16 ans lorsque mon copain m’a demandé d’aller prendre une baignade avec lui à 2 heures du matin.
Ma meilleure amie me l’a rappelé durement voulant me persuader de ce qui était déjà fait. Elle n’avait rien compris.
Ces hommes… oui, ils étaient vides, pathétiques et même doux. Ils ne m’avaient pas blessés, ni avaient-ils laissé des plaies invisibles ouvertes sur mon corps. J’étais totalement indifférente à ces expériences. Ces hommes étaient insignifiants, ils ne pouvaient rien me donner et plus précisément rien me prendre. Je me sentais toujours bien dans ma peau.
J’avais entendu beaucoup trop d’histoires qui se sont passées avec mes amies et ma famille. Elles étaient marquées, lacérées et pensaient toujours encore et encore à ces nuits horribles. Moi je dormais sur mon coussin doux, dans mon lit chaud et confortable et je n’y pensais même pas.
Est-ce qu’il y avait quelque chose cassé en moi qui me rendais si indifférente ? Est-ce que ces expériences m’avaient si marquées au point où je ne sentais plus ? Non ! Je ne voulais pas y croire. J’étais toujours vivante… mon esprit, mon existence continuait toujours en passion.
J’ai laissé tomber toutes ces pensées qui ne me prenaient nulle part.
Les années passèrent. Des hommes m’ont aimé. Des hommes m’ont adoré. C’était une période douce dans ma vie. Et je me sentais bien dans ma peau. Je n’étais pas un cas irréparable, cassé et usé. Mais tout simplement je ne sentais rien envers ces hommes qui m’ont créé un monde propre à moi. Quelque chose n’allait pas.
Et puis tout changea. Toutes mes préconceptions, mes doutes, mes questions disparurent. Mon cœur battait pour la première fois… je le sentais, j’en étais sure ! Mon sang froid jusqu’à ce moment coulait chaleureusement dans mes veines, propulsaient ma peau. Mon corps ne me contenait plus, j’explosais de vie.
Je l’ai vue, là bas dans son coin. Elle bougeait sensuellement, se fichant pas mal de son entourage. « Sur la piste au milieu des jeunes loup, elle danse ». J’étais éprise par ce corps qui ondulait, cette créature divine, à portée de main mais si loin quand même.
Jamais de ma vie j’avais sentie cette torture si agréable. Je sentais mes nerfs s’exciter, mes doigts se tendre, mon corps se tordre. Je me rapprochais d’elle lentement, je ne voulais pas lui faire peur, arrêter sa transe. Je ne voulais pas qu’elle parte. Toutes mes pensées rationnelles me dictaient de rester en place. Mais je ne pouvais pas me restreindre. L’envie, le désir, l’ardeur m’avaient possédé. Je lui ai touché sa main, ses doigts raffinés. Un courant électrique parcouru mon corps jusqu’à mes jambes. Elle est restée en place. Dansant toujours. Je me suis rapprochée encore plus. Sa main sur ma nuque, l’autre sur ma hanche. Le parfum si naturel, si érotique de ces cheveux m’étreignis captive. Je ne voulais qu’onduler avec ses mouvements. Et là, au milieu « des jeunes loups » il n’y avait que nos deux corps qui bougeaient en unisson.
J’ouvris les yeux. J’étais toujours assise au bar, mon verre de vin rosée en main, si chaud à présent. Mes yeux toujours en dialogue avec son corps divin.
Je souris.
Je pouvais sentir. J’existais. Des blessures je n’en avais pas.
Ce que j’avais, par contre, c’était un instinct différent, naturel et réel. Plus de doutes. Plus de questions.
Je savais ou j’étais dans ma vie, qui j’étais et ce que qui pourrait combler mon vide et revitaliser mon cœur.
Ma meilleure amie était en choque. Mais elle souriait.
« Qui est-ce cette meuf ? »
Aucune idée. Je ne voulais pas souiller cette mémoire. Je voulais laisser cette femme dansante à toujours dans mon âme. Elle est plus réelle que n’importe quel câlin que j’avais ressenti. Elle est ici, toujours dans mes pensées, la réponse à toute mes questions.
« Alors tu t’assumes en fin de compte… eh ben voila une bonne nouvelle. »
Mon amie n’avait pas d’autres questions à me poser. Toute question sera sans importance. Je devenais ce que je fus.
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