Courir à Grands Pas
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Une course avec le temps à travers les lieux, c’est ainsi que je m’éloigne du passé. Des champs, des territoires, et des vallées traversés vite et sans arrêt. Je les vois des fois uniformes, sans couleur ni odeur. Je contemple le temps qui passe. La fatigue est une ombre qui me suit, et je fais tant pour l’ignorer. Je perds mon souffle et je m’arrête, solennelle. Afin de me satisfaire je regarde en arrière avec anticipation. Ce long trajet est ma réalisation, me suis-je convaincue. Je ferme les yeux. Je soupire. J’imagine une plaine verte, couverte d’un chemin long, étroit, et courbé, tel dans l’arrière-plan de la Joconde. Je retourne. A l’instant même Réalité me gifle plein dans la figure en me rappelant que mon chagrin est indocile. L’air est sec, et les plaines, hélas, des steppes grises. Un désert… sans dunes. Je soupire. Je transpire. Je respire la solitude.
Malgré qu’il soit long, ce chemin demeure étranger. Je regarde derrière moi et dans le vide tout un abîme se révèle. J’ai porté ton cercueil et je n’ai su l’ensevelir malgré les interminables kilomètres que je me suis efforcée à franchir. Face au désespoir mes larmes coulent ; maintenant il n’y a plus que mes sanglots qui brisent le silence. Désorientée et dépourvue, je ne sais plus où aller. Ainsi j’ai passé ma vie à fuir et à t’attendre.
À la fois fatiguée et fragile, j’enlace mon corps pour me sentir sauve. La torpeur m’emporte, petit à petit. Je me réconforte en me disant que j’aurais quelques heures de paix. Mais aussi que demain, peut-être, je pourrai mieux respirer, et que cette fois-ci, vaudrait mieux ne pas courir. Que peut-être même la douceur d’un beau sourire et la tendresse de ses caresses apaiseront mes craintes. Et que cette fois-ci, que le temps passe en unité de larmes et d’envie. Faudrait bien porter le noir avant de revoir le jour.
Balancée entre le sommeil et l’éveil, une main chaude et rassurante, comme celle de mon père, caresse mes cheveux. Toute petite je ferme les yeux et me laisse aller. Des lèvres douces frôlent ma peau et réveillent mon âme assoiffée. Le bas de son ventre recueille ma rondeur charnue… je redresse mon dos. Je lève ma main et j’appuie mes doigts contre ce dos en la serrant contre moi. Je hausse la tête et tourne mon visage loin de lui pour le mener là où je désire ses morsures. J’enfonce mes ongles dans sa chair. Sa peau est si douce que je les efforce davantage. Un cri s’échappe.
A suivre.
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